Courrier des lecteurs
Le dossier central du deuxième numéro de la revue Histoire et Patrimoine des Gendarmes consacré à l’histoire de la police judiciaire a suscité un vif intérêt qui s’est manifesté par un abondant courrier.
Deux commentaires ont plus particulièrement retenu l’attention de la rédaction
Souvenirs fugaces d’un chef de SR de la première heure
J’ai participé l’année dernière, à Rennes, aux festivités commémorant les 35 ans d’existence de la Section des recherches de Gendarmerie de l’ex-duché de Bretagne. Quand je dis « Je » je devrais dire « Nous » car, nous les anciens de la première heure, et en quelque sorte les « derniers des Mohicans » étions tous présents : du moins les survivants !
Cet avenir nous l’avons cependant vu et, chemin faisant, vérifié la théorie de la relativité du temps ! Tout ce que nous avons élaboré comme prémices de ce futur s’est réalisé. Nos efforts à ce point de vue n’ont pas été vains et nous sommes fiers de notre « parcelle de Gloire » selon l’expression chère au Général Bigeard.
Mais ce que nous entrevoyions parfois également, comme un bruit de fond sourd et sournois, a également percé les limbes d’une histoire que nous refusions : la perte d’autonomie organique de notre famille.
L’histoire bégayera-t-elle ?
Un avenir que cette fois nous ne pouvons entrevoir le dira.
Continuons à faire confiance à notre patronne : comme le poète, elle voit plus loin que l’horizon.
Fait à Paris le 17 avril 2011
René HUMETZ
Doyen Honoraire des Juges d’instruction de Paris
Ex-Commandant de la Section de Recherches de Rennes
L’essor de la police judiciaire dans la gendarmerie durant les années 1980
À mon sens, l’affaire Grégory a été le déclencheur de l’évolution de la PJ en Gendarmerie. […]
C’est ainsi qu’à partir de cette année 1984, les moyens des SR ont sensiblement évolué. […] je suis arrivé à CAEN en septembre 1985 et je puis affirmer la pauvreté de nos moyens tant en personnel qu’en matériel […] le seul outil dont ne disposaient pas les BR était la paire de jumelles photo… elle ne nous a jamais servis !
[…] Avec le « port de la tenue civile » sont arrivées aussi les voitures banalisées. Heureusement car quel folklore auparavant : SIMCA 1100 d’une BMO repeinte en vert – R16 du Chef d’État-major montée de « fausses plaques ». Il était temps que tout cela cesse !
[…] Dans les colonnes de la revue, le Général CHARLOT évoque la création du laboratoire Gendarmerie l’I.R.C.G.N. Je ne peux m’empêcher d’avoir une pensée pour mon camarade de promotion, le polytechnicien Serge CAILLET. En effet, et alors qu’il était capitaine, il est à l’origine de l’embryon baptisé alors Section Technique d’Investigations Criminelles de la Gendarmerie (STICG). Embryon de l’IRCGN effectivement avec un effectif d’à peine 15 militaires pour commencer. Quel outil formidable il en a fait ensuite, avec la bénédiction des instances dirigeantes gendarmerie il est vrai ! […]
Mais parler de ces nouveaux outils destinés aux enquêteurs ne suffit pas. Il faut aussi évoquer les nouvelles techniques d’investigations et en particulier celle de mise sur pied de cellules d’enquête. Cela est encore une invention « gendarmique » que j’ai eu le plaisir d’inaugurer ou presque (après le camarade ORHAN à ANGERS) avec la mise sur pied de « l’affaire REGENCE ». Pendant plusieurs mois des MENS de la région de VERNOUILLET (78) (et qu’est ce que j’ai pu travailler sur eux) vidaient châteaux et maisons bourgeoises des Yvelines mais aussi et surtout des Pays de la Loire et de la Basse Normandie. C’est ainsi que je me suis retrouvé directeur d’enquête (D.E) installé au Fort de l’Est, tout près du marché aux puces de St OUEN, à la tête d’un groupe d’une douzaine d’enquêteurs des SR de CAEN – VERSAILLES – ANGERS – ROUEN et AMIENS complétés par des membres de certaines BR concernées.
Après 13 mois de travail acharné, de relations que je juge franches et amicales avec le Bureau PJ de la DGGN (encore NAPORA) l’OCROVOA (à l’époque) mené par le Commissaire Alain DEFERRE, des inspecteurs de la PJ VERSAILLES, nous avons démantelé le « gang des châteaux » deux jours de décembre 1987. Pas moins de 120 militaires et fonctionnaires ont participé à cette enquête d’envergure qui a permis la mise en détention de MENS et d’antiquaires belges et néerlandais, tous interpellés sur le territoire français.
Colonel (er) Alain THUREAU,
ancien commandant des sections de recherche de Gendarmerie de Caen (1985-1991), puis de Versailles (1991-1994).