DISCOURS DE M. GERALD DARMANIN, MINISTRE DE L’INTERIEUR
9 juillet 2020, Éloge funèbre de la gendarme Mélanie Lemée
Mesdames et Messieurs les parlementaires, Mesdames et Messieurs les élus, Messieurs les procureurs généraux, Monsieur le président du tribunal judiciaire, Mon général, directeur général de la gendarmerie nationale, Mesdames et Messieurs les officiers généraux, officiers, sous-officiers, gendarmes adjoints volontaires et personnels civils de la gendarmerie, Mesdames et Messieurs,
Monsieur et Madame Lemée (père et mère), Monsieur Marc Lemée (frère),
Samedi soir, à l’heure où chacun quittait ses occupations et s’accordait un moment de détente, la gendarme Mélanie Lemée servait et protégeait la population. Engagée pour mettre en place un dispositif d’interception, elle perdait la vie fauchée par un automobiliste refusant le contrôle.
25 ans, elle avait 25 ans. Elle avait fait le choix de l’engagement pour le service de la France. Dès 19 ans, elle rejoint la réserve de la gendarmerie, puis rapidement l’école des sous-officiers de Tulle.
À travers cet engagement, elle incarnait ce que la jeunesse a de plus beau, de plus grand : le service désintéressé, le don de soi, le besoin d’être utile.
À travers cet engagement, elle incarnait aussi les valeurs les plus nobles de la République : la justice, la protection des plus faibles, la défense de notre beau pays.
Dans la gendarmerie, elle a trouvé des missions à la hauteur de sa soif de servir, une camaraderie la renforçant dans ses choix, un uniforme dont elle était fière.
Cette passion, elle la partageait avec vous, ses camarades de la communauté de brigades d’Aiguillon et du groupement de gendarmerie départementale du Lot-et-Garonne.
Vous, qui chaque jour êtes engagés en intervention, vous avez choisi un métier difficile, un métier risqué. Vous le savez mieux que quiconque, la violence peut survenir à chaque instant, la détresse des victimes est votre quotidien. Vous comptez dans vos rangs des blessés nombreux, des morts trop souvent. La nation connaît votre sacrifice.
Comment ne pas penser, en cet instant, à ce drame de Collobrières, où la maréchale des logis chef Audrey Bertaut et l’adjudante Alicia Champlon ont perdu la vie ?
Comment ne pas penser, aussi, au major David Lannes, du groupement de la Gironde, mais également ancien de la brigade d’Aiguillon, percuté par un motocycliste refusant d’obtempérer ?
Le meilleur moyen de ne pas les oublier est de leur rendre hommage et de servir, comme ils ont servi, avec la même force, avec la même conviction. Vous avez choisi un métier utile, indispensable au pays, à la population. La France a besoin de vous, à chaque instant. Sans vous, pas de liberté d’aller et venir, pas d’égalité devant la loi, pas de fraternité et de cohésion nationale, pas de possibilité de vivre ensemble, pleinement, sereinement.
Dans ces terribles circonstances, qui nous rassemblent aujourd’hui, la République veut vous dire que votre engagement n’est pas vain, et qu’il ne le sera jamais. Au contraire, il est l’honneur de la République. Vous êtes les forces de l’ordre, ceux qui nous protègent.
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Mélanie Lemée a vécu cet engagement avec passion, avec énergie, avec la volonté de toujours mieux servir.
Affecté le 4 juillet 2016 à la brigade d’Aiguillon, elle s’est rapidement distinguée tant auprès de ses chefs que de ses camarades. Ses chefs la décrivent comme dotée d’une puissance de travail redoutable, forçant l’admiration par sa disponibilité, sa ténacité, son engagement professionnel sans faille.
Fiable et loyale, elle bénéficiait de la confiance absolue de son commandement. Ses efforts avaient été en février dernier récompensés par l’obtention du diplôme d’officier de police judiciaire. Cet engagement, elle l’a démontré une nouvelle fois, lors de la période de confinement, en s’illustrant par son action résolue auprès de la population du Lot-et-Garonne. Elle a été pour cela mise à l’honneur par Madame la préfète.
Professionnelle accomplie, Mélanie Lemée était aussi une bonne camarade, capable à 25 ans de veiller sur les plus jeunes, de contribuer à la cohésion de l’unité par son rire, son humour, sa joie de vivre.
L’amitié était pour elle une valeur fondamentale, une valeur à respecter. Elle le démontrait au quotidien, avec ses camarades.
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Mélanie Lemée était aussi une combattante. Pas uniquement dans son engagement professionnel. Elle l’était bien sûr dans le judo, sa discipline de prédilection, sport dans lequel, championne de France militaire à plusieurs reprises, elle a tant brillé.
Elle l’était combattante, par tempérament, ne cédant jamais rien, dès lors que des principes étaient en jeu. La lutte contre l’injustice était le combat qu’elle s’était choisie. C’était une femme engagée et elle savait que la gendarmerie était faite pour les français qui, comme elle, ressentent le besoin de mener des combats : des combats pour protéger les plus faibles, les plus exposés, les plus fragiles. Des combats pour permettre aux gens de vivre ensemble, de vivre libres et heureux.
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Une grande gendarme, une bonne camarade, une combattante de valeur : Mélanie Lemée, Mesdames et Messieurs, suscite notre admiration.
La vôtre, vous qui la connaissez si bien. La mienne, au nom du gouvernement de la République. Celle de toute la France, de toute une Nation L’émotion est immense dans les rangs de la gendarmerie.
L’émotion est immense dans le Lot-et-Garonne, dans la Région, dans notre pays.
À vous, ses parents, son frère, au nom du président de la République, je m’incline devant votre chagrin et veux vous dire combien nous sommes et nous serons à vos côtés.
La République est à vos côtés, car la République sait ce qu’elle doit à Mélanie, comme elle sait ce qu’elle doit à tous les gendarmes qui la servent.
Mélanie Lemée, Aujourd’hui, sur cette place d’arme, les honneurs militaires vous sont rendus. Ils sont rendus à un soldat de la loi qui a donné sa vie dans l’accomplissement de sa mission.
Gendarme Mélanie Lemée, je vous promeus à ce titre au grade de major. Major Mélanie Lemée, les décorations qui vous seront décernées témoignent de la considération et du respect exprimés par la Nation toute entière.
Il est enfin une ultime distinction, Major, pour vous honorer. Et c’est la plus belle : le drapeau tricolore, notre beau drapeau, étendu sur vous, devant nos yeux. Un drapeau que vous aviez fait le choix de défendre comme gendarme. Un drapeau que vous aviez fait le choix d’honorer, aussi, comme sportive. Ce drapeau dit à lui seul le sens que vous avez donné à votre vie. En cet instant c’est donc la Nation, c’est donc la République, c’est donc la France – que vous avez si bien servies – qui s’inclinent respectueusement devant vous et vous rendent hommage.